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J'ai lu... SOIF d'Amélie Nothomb

  • MSchaller
  • 12 mai 2020
  • 3 min de lecture

Amélie Nothomb est une romancière belge d'expression française.

Auteur prolifique, elle publie un ouvrage par an depuis son premier roman, Hygiène de l'assassin (1992). Ses romans font partie des meilleures ventes littéraires et certains sont traduits en plusieurs langues. Stupeur et Tremblements remporte en 1999 le grand prix du roman de l'Académie française. (Source : Wikipédia)

J’ai lu SOIF d’Amélie Nothomb chez Albin Michel, 2019.

Il s’agit d’un petit livre de 150 pages qui parle de Jésus ; ou plutôt c’est Jésus qui parle ; de lui-même, de ses pensées, de ses sentiments, de ce qu’il a vécu. Le livre commence lors du jugement devant Pilate, se poursuit dans le cachot jusqu’à la résurrection en passant par la crucifixion.

Le Jésus d’Amélie Nothomb se révèle insolite et inattendu en raison de ce qu’on sait de lui dans les évangiles. Il raisonne de façon humaine encore que très sagement. Il fait allusion à plusieurs miracles qui ne l’enthousiasment guère à part celui de Cana où, devant l’insistance de sa mère, il change l’eau en vin aux noces. Et là, moins pour le miracle que pour l’ambiance de ce moment, il se souvient avec plaisir : « Le soir de Cana, ivres nous l’étions tous, et de la meilleure façon. Oui, ma mère était pompette, et cela lui allait bien. Depuis la mort de Joseph, je l’avais rarement vue heureuse. Ma mère dansait, j’ai dansé avec elle, ma bonne femme de mère que j’aime tant. » Une Marie sympathique, joyeuse, dépeinte sous un jour différent de la solennelle Marie du « Je vous salue » ou des icônes sacrées qui la représentent avec son bébé.

Au long du livre et c’est le fil rouge du roman, Jésus magnifie la soif : « il y a tant à découvrir dans la soif ». Selon lui « l’extrême soif est une transe mystique idéale » puis il explique : « après avoir durablement crevé de soif, ne buvez pas le gobelet d’eau d’un trait. Prenez une seule gorgée, gardez-la en bouche quelques secondes avant de l’avaler. Mesurez cet émerveillement. Cet éblouissement, c’est Dieu ». Conception mystique de Dieu en effet et c’est le cas de dire : une soif d’absolu. Plus tard dans le texte, on retrouve Jésus qui se refuse la possibilité de boire que lui offre le géôlier car il sait que son calvaire sera long et très dur : « la déshydratation me handicapera lorsqu’il s’agira de porter la croix » mais la soif paradoxalement le soulagera de la souffrance physique lorsqu’il suera sang et eau : « la soif me protégera. Elle peut prendre une ampleur telle que les autres souffrances s’amortissent ». Sur la croix enfin et avec un trait d’humour, après avoir déclaré : « j’ai soif », Jésus confie au lecteur : « en vérité, je vous le dis, tout clouté que je suis, un verre d’eau me ferait crever de jouissance » et en effet, on lui tend une éponge de vinaigre et d’eau qui le fera exulter.

Jésus évoque Marie-Madeleine aussi, dont il est tombé amoureux au premier regard. « Quand j’ai vu ton visage [dit Jésus] je n’en suis pas revenu. Je ne savais pas que tant de beauté était possible ». Et il ajoute au sujet de l’ambiguïté de l’amour, cette très belle affirmation : « L’amour concentre la certitude et le doute : on est sûr d’être aimé autant qu’on en doute (…). Chercher à se débarrasser de ce versant dubitatif en posant mille questions à l’aimée, c’est nier la nature radicalement ambiguë de l’amour ».

Ne serait-ce que pour le style d’écriture, ce roman vaut le plaisir d’être lu. Mais aussi pour ce Jésus original qui dément certains passages des Evangiles, pour sa sagesse, sa modestie ce qui le rend éminemment sympathique.

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©2020 par Monique Schaller.

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